Si aujourd'hui la séparation parentale constitue une configuration relativement courante, elle reste une situation singulière pour l'enfant qui y est confronté.
Quelques précautions du côté parents
L'annonce de la séparation parentale est une étape indispensable. Les parents pensent parfois que mieux vaut ne pas trop en dire, sur les raisons de leur rupture. Ne pas expliquer peut constituer un passage à l'acte traumatique pour l'enfant. La façon dont la séparation parentale sera annoncée revêt pour autant quelques précautions.
Il est tout d'abord nécessaire que les deux parents soient présents et se soient mis d'accord en amont, sur la façon d'annoncer les choses. Si chacun a un point de vue différent, chaque parent peut exprimer sa vision en nommant cette différence. L'enfant pourra alors se repérer même si les points de vue de ses parents divergent.
Les affects de chacun devront avoir été élaborés avant cette annonce, afin que les parents ne soient pas submergés émotionnellement.
Le discours sera adapté à l'âge de l'enfant et à ses capacités de compréhension. Mettre des mots sur la réalité sera la façon la plus authentique d'exprimer les raisons de la séparation. Verbaliser ce qui se passe donnera du sens. Chaque parent doit donc pouvoir exprimer ses raisons ou ce qu'il pense,
Les enfants sont tout à fait capables d'assumer la réalité qu'ils vivent à partir du moment où celle-ci est exposée, verbalisée, humanisée. Humaniser la situation, c'est aussi exprimer certains faits que l'on aurait tendance à cacher, par exemple : "nous ne sommes plus amoureux", " nous nous disputons trop souvent".
L'enfant aura très vite besoin d'une représentation concrète de la situation, à savoir : comment va se traduire pour lui cette séparation?. Il aura donc besoin que lui soit expliqué d'emblée ce qui va changer dans l'organisation concrète de sa vie : son lieu de vie, son lieu de scolarisation, l'organisation quotidienne, le déroulement des rencontres avec le parent qui n'est pas en garde principale, où vont se dérouler les vacances, les fêtes religieuses, son anniversaire...
Intégrer l'enfant à certaines décisions (décoration de la nouvelle maison, choix d'un appartement) l'aidera à assimiler la nouvelle situation.
Enfin, il est essentiel de dire à l'enfant qu'il a été désiré par ses parents qui se sont aimés (si tel a été le cas), et qu'ils ne regrettent pas sa venue au monde. Le sentiment de responsabilité assumée, tant au niveau de sa naissance que du choix de se séparer, évitera à l'enfant le sentiment de culpabilité si fréquent lors d'une séparation parentale.
L'adaptation de l'enfant
La capacité d'adaptation de l'enfant dépendra de son âge, mais aussi de sa maturité affectivo-intellectuelle.
De façon générale, la séparation parentale confronte l'enfant à un sentiment de perte et d'insécurité.
Il faudra généralement du temps à l'enfant pour intégrer cette réalité inconnue. Lui expliquer comment sa nouvelle vie va s'organiser de façon précise reste donc essentiel. L'utilisation d'un calendrier est préconisé pour les plus jeunes: les jours chez maman en vert, les jours chez papa en jaune, l'aideront à mieux se représenter cette nouvelle organisation.
L'enfant face à la séparation parentale est en perte de repères. Il faudra être vigilant à ce qu'il ne soit pas amené à penser que le parent n'aime plus en lui l'autre parent. En effet, l'enfant porte en lui ses deux parents, car il s'identifie en partie à chacun d'entre eux pour se construire. Cette identification parentale est nécessaire au développement de tout un chacun, et constitue les bases du narcissisme (l'amour de soi). Lorsque les parents ne s'aiment plus ou se séparent, l'enfant peut être amené à penser inconsciemment que la part qu'il porte en lui de chacun de ses parents, sera rejetée par l'autre. C'est pourquoi lui dire par exemple : "je me sépare de maman/papa mais pas de toi", peut constituer une base sécuritaire.
Le vécu psychique face à la séparation parentale s'apparente à celui du deuil. Ainsi, les différentes étapes du deuil seront souvent traversées (de façon plus ou moins marquée ) : déni, colère, marchandage, dépression, acceptation.
Chaque étape devra être respectée. L'aide d'un thérapeute peut également s'avérer nécessaire dans l'accompagnement de ce processus.
Le déni constitue la première étape, et permet une protection contre cette réalité douloureuse. C'est pourquoi l'enfant ne réagit pas forcement à l'annonce.
La colère, la tristesse et le sentiment d'impuissance précèderont l'étape de l'acceptation de la réalité.
Ces manifestations seront alors à comprendre comme une étape nécessaire au processus d'acceptation. Dès lors, ces réactions devront être transformées en mots. L'art ou le sport peuvent également constituer une aide précieuse.
Enfin, lorsque la séparation conjugale survient dans des familles marquées par d'importants conflits voire de la violence, elle peut être un soulagement pour l'enfant qui se sent alors protégé de ces tensions au quotidien.
En revanche, la persistance des conflits après la séparation peut amener l'enfant à se sentir partiellement responsable et démuni face à cette situation. Il sera donc nécessaire de tenir compte de la façon dont l'enfant perçoit ces conflits.
Enfin, le besoin majeur de l'enfant face à la séparation parentale sera d'être assuré de la sécurité affective de chacun de ses parents, et d'être préservé à une place d'enfant. Cela passera par la stabilité du lien à ses deux parents, et plus largement à l'ensemble des membres de la famille.
Delphine Fargeon, psychologue
Merxi de vôtre commentaire
Merci pour cette approche claire, simple, et déculpabilisante, qui tend à dédramatiser une situation que beaucoup de parents ont vécue ou vivront.
Merci, article tres utile pour moi tant sur l analyse du ressenti des enfants que sur les conseils concrets pour nous aider a gerer la suite